Odette Cesari,

Directrice générale

d’AXA Epargne entreprise

 

« Axa est présent sur tous les continents, un peu moins en Amérique du Nord et en Amérique du Sud et emploie 160 000 salariés, près de 50 000 en Europe, 15 000 en France.

A l’origine, AXA est un groupe français. Depuis 30 ans, il s’est diversifié à l’international. Les années 1990 ont été des années de croissance importante en Europe : aux Pays Bas, au Royaume Uni, en Allemagne, en Italie, en Espagne…où nous avons essentiellement acquis des entreprises existantes.

A ce titre, nous avons suivi de très près, depuis 30 ans, les évolutions de la réglementation européenne. C’est une des raisons pour lesquelles nous sommes présents dans des branches d’activités différentes : automobile, habitation, assurance des entreprises pour la santé des salariés, prévoyance, retraite etc.

Nous sommes soumis à la directive sur la solvabilité 2 qui fixe le montant de capital nécessaire pour exercer les professions que nous exerçons et ce montant de capital est d’autant plus faible que la diversification est large. Les risques sont ainsi « lissés » quand on ne travaille pas sur le même pays et les mêmes activités.

Pour nous, le développement international signifie à la fois de la croissance et de l’optimisation de capital. C’est aussi des occasions d’innover : d’appréhender les besoins des assurés dans d’autres pays. Nous pouvons ainsi importer des idées utiles à développer sur notre marché.

Quelle est la pertinence du niveau européen ?

Il faut lier la question de la pertinence européenne avec le cas de salariés qui sont amenés à travailler dans plusieurs pays.

En ce qui concerne le « Cross » européen et le Produit d’épargne retraite paneuropéen (PEPP), il y a beaucoup de bonnes intentions. Il est logique qu’une personne qui a travaillé dans plusieurs pays puisse préparer sa retraite sereinement. J’ai participé aux réunions organisées par  la Commission européenne pour préparer le PEPP. Un seul sujet a été rejeté de la discussion : celui de la fiscalité. Or la fiscalité n’est pas harmonisée à l’échelle européenne. Pourtant, quand il s’agit d’épargne et encore plus d’épargne longue, pour préparer sa retraite, la question de la fiscalité devient fondamentale. En France, la loi Pacte  va transformer l’épargne retraite, pour la rendre plus lisible, mais ne fait aucun lien avec le PEPP.

Impossible de bâtir un dispositif commun

Aujourd’hui, quelqu’un qui travaille en France, qui aura une épargne retraite dans un produit loi pacte, qu’il soit individuel ou collectif, devra ouvrir un autre compte s’il va travailler en Allemagne par exemple, sous une autre forme avec d’autres conditions fiscales et sociales.C’est vrai dans tous les domaines de l’assurance.

Nous nous plaçons dans la directive européenne « libre  prestation de services ». Ce qui signifie que n’importe quel assureur européen, à partir du moment où il est réglementé et agréé dans un pays, peut exercer dans d’autres pays.

Nous pouvons ainsi importer des idées utiles à développer sur notre marché.

Mais ce n’est qu’une partie du sujet. Quand il s’agit d’aborder la question des remboursements de santé par exemple, les problématiques réglementaires locales existent. Quand on en arrive à l’épargne retraite, selon les pays la réponse est différente.

Il est impossible de bâtir un dispositif commun à l’ensemble des pays, pourtant tous nos clients en rêvent. Nous n’arrivons pas à avoir des dispositifs harmonisés et encore moins transportables d’un pays à l’autre.

Il existe pourtant dans les entreprises une réelle volonté d’harmoniser les droits des salariés en imposant à travers toutes les filiales, constitutives des entreprises, une espèce de socle minimum : sur le congé parental par exemple, sur le reste à charge des dépenses de santé par exemple.

Ce que l’Europe n’a pas encore fait, se dessine dans les grandes entreprises. Mais pour cela, il est préférable qu’elles disposent d’un Comité d’entreprise européen (CEE).

Nous n’arrivons pas à avoir des dispositifs harmonisés, encore moins transportables d’un pays à l’autre.

Cette volonté est visible aussi au niveau des actions de prévention. Beaucoup d’entreprises sentent la nécessité d’informer les salariés et pas seulement sur les risques liés au travail, mais sur les risques en général. Certaines développent des initiatives sur la nutrition, sur l’activité physique, ou plus ciblée, pour les opérateurs qui travaillent sur écran par exemple. Le reste à charge en matière de santé est aussi un thème central.

Ce qui n’est pas harmonisé au niveau Européen commence déjà à apparaître au niveau européen dans les entreprises grâce aux CEE.

De nouveaux dispositifs

Tout le monde sait que la santé coûte cher aux Etats Unis et à quel point la population est mal protégée parce que l’assurance santé a très mal évolué : des coûts extrêmement importants, une organisation des soins très mal faite.

Aujourd’hui, des entreprises de la tech proposent des « parcours de soins ». Ce qui revient moins cher que l’accès habituel à des soins de qualité et permet de retrouver une assurance santé qui a plus de sens et qui correspond beaucoup mieux aux besoins pour un prix plus abordable.

Pour arriver à faire cela, il faut quand même un statut d’assureur tout en développant le « parcours client ».

Ces assurances techs viennent se réassurer auprès de nous par exemple, ou d’autres, parce qu’elles ne veulent pas consacrer leur capital au capital réglementaire.

Ce dispositif est sans doute appelé à se développer en Europe »

Mis en ligne le 27 novembre 2019